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tonner contre l’imposteur, les cures merveilleuses n’en allaient pas moins leur train, malgré les nombreuses mystifications auxquelles le faiseur de miracles était exposé de la part des jeunes gens transformés en aveugles, sourds, boiteux et affectés de tous les maux échappés de la boîte de Pandore. Les autorités mirent heureusement fin à ces farces, en signifiant à l’imposteur que s’il ne déguerpissait immédiatement, il irait faire son prochain miracle entre les quatre murs d’un cachot. Le saint improvisé se le tint pour dit, loua une bonne voiture et disparut pendant la nuit, chargé des dépouilles des badauds de Québec. Je pourrais citer de nombreuses anecdotes, qui ne seraient guère goûtées des descendants de ceux qui furent alors les victimes de cet imposteur. Mes compatriotes canadiens-français se plaindront, peut-être, de ce que je n’ai pas assez épargné les ridicules de leurs ancêtres dans cette occasion, mais comme je ne m’épargne guère moi-même quand la circonstance s’en présente, j’attends amnistie entière de leur part.

Toutefois, crainte que mes concitoyens de l’autre origine se plaignent, avec raison, que je les aie négligés par partialité pour mes compatriotes, je vais parler de ce qui les occupait principalement à cette époque. Certes, la chose en valait la peine : il ne s’agissait ni plus ni moins que de la venue de l’antéchrist, de la bête de l’Apocalypse, dans la personne de Napoléon I. La prophétie était enfin accomplie.

Mais avant d’aborder ce sujet, jetons un coup d’œil sur ce qui se passe de nos jours dans notre bonne ville de Québec.