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Canada qui ont combattu épaules contre épaules avec leurs frères canadiens-français, accordons aux hauts-canadiens la gloire qu’ils ont acquise pendant cette guerre dans leur province, mais laissons aux Canadiens-français celle d’avoir sauvé le Bas-Canada.


CHATEAUGUAY DE SALABERRY.


Les Canadiens ne parlaient qu’avec orgueil, pendant ma jeunesse, de leur jeune compatriote Charles-Michel de Salaberry, fils du précédent, lorsqu’il n’était encore que lieutenant au 60e régiment de l’armée britannique. Ils savaient que l’honneur de leur race était en mains sûres et qu’il ne la laisserait pas insulter impunément : il en avait donné une preuve éclatante dès le début de sa carrière militaire.

Le corps des officiers du 60e régiment était composé d’hommes de différentes nations : d’Anglais, de Prussiens, de Suisses, d’Hanovriens et de deux Canadiens-Français, les lieutenants de Salaberry et DesRivières. Il était difficile qu’il régnât beaucoup d’harmonie entre des éléments aussi disparates : les Allemands surtout étaient querelleurs, emportés et duellistes.

Le lieutenant de Salaberry déjeunait avec quelques frères d’armes, lorsqu’un officier allemand entra dans la chambre, regarda le jeune Canadien d’un air insolent et dit :

— Je viens d’expédier pour l’autre monde un Canadien-Français !

Il faisait allusion au lieutenant DesRivières qu’il venait de tuer en duel.