Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/430

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Bon jeune homme, dit le fantôme, si Josephine reprenait la santé, vous seriez donc encore disposé à en faire votre femme ? Vous méritez pourtant un meilleur sort que d’épouser une jeune fille qui peut vous rendre malheureux le reste de vos jours !

— M. le fantôme, reprit Lamonde, chacun son goût : j’aime mieux être malheureux avec elle qu’heureux avec une autre. Je n’aime guère, voyez-vous, qu’on se fourre le nez dans mon ménage : si vous n’avez pas d’autres consolations à me donner, bonne nuit donc.

Et il se leva pour partir, mais le fantôme lui fit signe de se rassir et il obéit.

Après un petit bout de temps, le spectre reprit la parole :

— Les chirurgiens ont dit que Joséphine était pulmonique et ils ne se sont pas trompés. Ils ont déclaré que c’était une maladie mortelle et n’ont pas dit la vérité ; car si avec tout le savoir dont ils se vantent, ils n’ont jamais pu découvrir de remède pour la guérir, il y en a pourtant un. Et la mort sert souvent la vie. Emportez une poignée de cette herbe sur laquelle vous pillez, pour la reconnaître demain ; faites lui en boire des infusions, et dans un mois elle sera convalescente. Adieu ; la barre du jour va paraître, je n’ai que le temps de vous dire que votre fiancée est tranquille maintenant, je lui ai soufflé à l’oreille que vous m’aviez délivré.

Et le fantôme avait disparu. Lamonde tout joyeux mit une poignée d’herbe dans sa poche, sauta par dessus le mur du cimetière et un quart d’heure après, il entrait chez LaFine. Elle lui tendit les bras de tant loin