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MÉMOIRES.

lieu où Montgomery a reposé jusque vers l’année 1825, que son corps fut remis à sa famille par les autorités d’alors. Il ne reste plus aujourd’hui au Canada que le souvenir de sa défaite et son épée maintenant entre les mains de monsieur l’assistant-commissaire-général Thompson, auquel son père, un des défenseurs de Québec, l’a remise en mourant.

Le rebelle Montgomery reposait depuis trois jours dans sa tombe, peu regretté des Anglais qu’il avait trahis, et encore moins des Canadiens-français, dont il avait incendié les paisibles habitations en 1759, lorsqu’il servait sous le général Wolfe. Déjà peut-être il était oublié de ceux qui avaient été naguère ses amis, lorsqu’on s’aperçut qu’un seul et dernier ami, le plus fidèle quoique privé de la raison, ne l’avait pas abandonné.

Quelqu’un informa mon oncle Charles de Lanaudière, aide de camp de Lord Dorchester, qu’un superbe chien de la grande race des épagneuls était couché, depuis trois jours, sur le sépulcre de Montgomery, et qu’il grattait la terre avec ses pattes en poussant des hurlements plaintifs et douloureux, quand une personne en approchait.

Ce fidèle gardien de la tombe implorait-il dans son langage la pitié des passants pour rappeler son maître à la vie, pour l’aider à déblayer la terre qui l’étouffait ? Que se passait-il dans ce cœur fidèle et affectionné ? Il devait souffrir des angoisses bien cruelles puisqu’il implorait la commisération même des meurtriers de son maître !