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traitements qu’on lui fit subir. Il n’en fut pas moins un des premiers à voler à la frontière au secours de la patrie en danger, lorsque éclata la guerre de 1812 contre les Américains.[1]

Son caractère ferme et indomptable lui fit éprouver plus de mauvais traitements pendant sa détention qu’aucun autre des patriotes exposés aux persécutions de l’oligarchie ; je dois cependant en excepter Corbeille, qui mourut victime de la cruauté de ses bourreaux. Quant au major LaForce, il fut aux portes de la mort et ne dut la vie qu’à son tempérament de fer et à la trempe de son âme.

— Tant que je ne fus pas malade, nous disait-il, je conservai toute ma gaieté naturelle dans l’affreux cachot dans lequel on m’avait plongé. N’ayant ni livres, ni encre, ni plumes, ni papier, je m’amusais à tracer avec du charbon tout ce qui me passait par la tête sur les murs de mon cachot, d’où je ne recevais le jour que par une petite fenêtre grillée. Je charbonnai un jour deux pièces d’artillerie opposées l’une à l’autre avec deux boulets, sortant de leur bouche prêts à se heurter ; et j’écrivis au-dessous la devise : La force contre la force. Le geôlier en informa aussitôt les autorités, ce qui me procura le lendemain la visite de deux magistrats. Ces messieurs, saisis d’horreur à la vue de ces insignes belliqueux, se regardèrent en secouant la tête en silence, et finirent par me demander ce que signifiait cette menace.

  1. Le major fut ensuite promu au garde de Lieutenant-Colonel.