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la prétendue poudre dans sa bouche, c’était de la graine d’oignon.

— Rira bien qui rira le dernier, se dit en lui-même le chasseur.

Il se rend à la grande ferme du séminaire, le père Jean Guilbaut était absent, mais sa femme était au logis.

— Bonjour, madame Guilbaut, fit McCarthy, je vous apporte une grande nouvelle : nos bonnes gens vont bien vite revenir, à telles enseignes qu’une de nos cousines de Normandie a envoyé à ma mère un superbe présent de graines d’oignon.

— Mais, dit la mère Guilbaut, votre cousine a eu une singulière idée que celle d’envoyer de la graine d’oignon à votre mère, au lieu de lui faire un beau présent de rubans, de dentelles et de soieries.

— Avez-vous, la mère, entendu parler du général Bonaparte ?

— Certainement, dit la vieille ; on dit que c’est un aussi grand guerrier que le défunt général Montcalm.

— Bah ! fit McCarthy : votre général Montcalm n’embrochait que deux Anglais d’un coup d’épée, Bonaparte en embroche dix ; et comme il est toujours en guerre contre l’Anglais, il fait saisir tous les rubans, dentelles et soieries pour bourrer ses canons : c’est ce qui a empêché ma chère cousine d’en envoyer à ma mère.

– Vous êtes un drôle de corps, monsieur McCarthy, fit la vieille !

— Il faut bien rire un peu, dit Justin, en ouvrant le mouchoir qui contenait la graine d’oignon. Bonaparte va donc venir bien vite avec nos bonnes gens ; vous