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« Grand Dieu ! Sauvez le Roy (bis)
Vengez le Roy !
Que toujours glorieux,
Louis victorieux,
Voye ses ennemis
Toujours soumis !
Grand Dieu ! Sauvez le Roy !
Grand Dieu ! Vengez le Roy !
Sauvez le Roy ! »

Il est probable que l’érudit Fletcher ignorait l’origine de l’air national, que les Anglais ont eu le bon goût d’adopter, et les Français, le mauvais goût de ne pas apprécier, et que s’il eût su que l’Angleterre était redevable de ce beau chant à un Français, et qu’il avait été composé pour un monarque français, il aurait alors chanté « Rule Britannia » au risque de chasser de la chambre les oreilles les plus cuirassées.

M. Fletcher n’y allait pas de main morte lorsqu’il était juge stipendiaire des cours trimestrielles de la paix et chef de la police à Québec. Lorsqu’il condamnait un criminel à être fouetté, punition très-fréquente alors pour les petits larcins, la sentence portait que le coupable serait fustigé jusqu’à ce que son dos fût ensanglanté. Tant pis pour ceux dont la peau était dure comme des requins : c’était leur affaire : pourquoi n’avaient-ils pas la peau plus fine !

Il apprend un jour qu’un pauvre diable, stationné près de la porte Saint-Jean, était possesseur d’une roulette : les passants mettaient un sol ou deux sur la table, tournaient la roue, gagnaient quelquefois un écheveau de fil, un papier d’épingles, ou quelque chose de cette valeur, ou en étaient pour leurs déboursés. Fletcher se fait amener le coupable, envoie quérir le bourreau sans même en prévenir le shérif et fait administrer au