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un brevet d’officier, il en avait adopté la forme qu’il n’avait pas oubliée.

Nous étions, je crois, en seconde, lorsque Monseigneur Plessis tenant à la main un cahier de deux pouces d’épaisseur, bourré de dates chronologiques, entra dans notre classe avec son élève. Il passa le cahier à notre régent et le pria d’interroger Vallière en lui recommandant de changer souvent de pages ; et celui-ci répondit juste et sans hésiter pendant au moins un quart d’heure : ce n’était pourtant pas la mémoire du perroquet, il paraissait y avoir de la réflexion dans chaque réponse.

Le tour de force de sa mémoire prodigieuse que je vais citer, me paraît encore plus surprenant. Vallière n’est entré au séminaire que pour faire son cours de philosophie : nous étions alors externes tous deux, et dans la même classe, lorsqu’un de mes amis me dit un jour :

— J’ai rencontré Vallière avec un jeune étranger, et ils parlent tous deux une langue inconnue.

Je ne manquai pas d’en parler à Vallière.

C’est, me dit-il, un jeune Portugais arrivé à Québec dernièrement, et recommandé à la maison Lester et Morrough. Il ne sait parler que sa langue maternelle et nous sommes voisins à la basse-ville ; il paraissait beaucoup s’ennuyer, et je me suis dépêché d’apprendre son langage pour converser avec lui. Venez ce soir chez Plamondon, où nous devons nous réunir, et je vous l’introduirai à tous.

Nous passâmes une soirée des plus agréables, faisant mille questions au jeune étranger, sur le Portugal, sur