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jouant le rôle de gentilhomme, il n’est pas surprenant que deux jeunes gens, comme nous, aient pris Walker pour un des plus fashionables gentlemen de la cité de Londres.

Au début de la guerre de l’année mille huit cent douze, le docteur Laterrière fut nommé chirurgien major dans le corps des voltigeurs, bataillon d’élite de la milice incorporée, commandé par le colonel de Salaberry. Il servit avec distinction pendant toute la durée de la lutte avec nos voisins. Il passa ensuite en Angleterre, où il épousa une riche héritière, la fille de Sir Fenwick Bulmer. Il me racontait, à ce sujet, un petit incident caractéristique d’un homme d’affaire de la cité de Londres.

Mon cher beau-père, disait-il, faisait valoir deux raisons puissantes pour me refuser la main de sa fille : la première, parce que j’étais catholique, et la seconde, parce qu’il me considérait comme un jeune homme dissipé, prodigue même (il se trompait fort) et plutôt enclin à dépenser les écus qu’à les faire profiter. Mais ce que femme veut Dieu le veut, et Sir F. Bulmer finit par consentir d’assez mauvaise grâce à notre union. Il me dit la veille du jour fixé pour le mariage :

— Je suppose qu’au train de vie que vous menez, vous n’êtes guère chargé d’argent : voici un ordre de cent louis sur mon banquier ; mais vous me devez un chelin pour le droit de timbre.

Je mis son check dans une poche, et tirant un chelin de l’autre, je le présentai à mon futur beau-père, qui le mit tranquillement dans la sienne. Son intention