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possible de bien reconnaître maintenant les lieux, dont je voulais donner une description exacte.

— Je me fais fort, me dit-il, d’aider votre mémoire, car j’ai constamment passé et repassé dans cette partie de la ville depuis mon enfance.

Nous étions le lendemain sur les lieux.

— Voici, me dit-il, la partie de la rue Saint-Charles, et de la Canoterie, que l’eau inondait à la marée haute. Ici, au pied du cap, étaient les maisons ornées de galeries qui livraient passage aux piétons. À dix pieds au nord, où est cette épicerie, j’ai vu, il y a cinquante ans, un navire décharger une cargaison de bouteilles.

La lumière se faisait dans mon esprit à mesure qu’il me parlait : j’étais transporté aux beaux jours de ma jeunesse ; tout passait devant mes yeux comme les ombres produites par une lanterne magique.

— Tous les Canadiens, fit le major, se connaissaient alors : les passants s’asseyaient sans façon aux fenêtres des propriétaires de ces galeries, et l’on faisait la jasette avec les gens de la maison, sans plus de façon que si l’on eût été chez soi.

Et les deux vieillards soupiraient à ce souvenir du bon vieux temps.

Après la scène que j’ai décrite plus haut entre le docteur Laterrière et moi, il me semble ne pouvoir mieux terminer ce chapitre qu’en entretenant le lecteur de cet ami de mon enfance.