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ses clercs, mais en agissait avec nous comme si nous eussions été ses propres enfants. Outre les fréquentes invitations que nous recevions à sa table, lorsqu’il donnait de grands dîners, nous étions constamment invités aux parties du soir. Malgré les reproches auxquels sa politique l’a exposé, M. Sewell n’en était pas moins, dans la vie sociale et privée, un des hommes les plus estimable que j’aie connus. Sans parler de sa charité envers les pauvres et d’autres qualités solides, il avait aussi la courtoisie d’un Anglais de la vieille souche. Lorsque je signai le brevet d’usage, en entrant dans son bureau, mon père mit sur sa table un rouleau de cent guinées, honoraires que monsieur le procureur du roi exigeait pour les cinq années d’étude de ses clercs. M. Sewell écrivit une quittance de cette somme au bas de l’acte, et dit à mon père : Accepter votre argent, monsieur, serait m’ôter le plaisir que j’ai de recevoir un jeune gentilhomme comme votre fils dans mon étude.

La gratitude n’a jamais été un fardeau pour moi, et je saisis avec plaisir cette occasion, la seule qui se présente, de rendre justice aux éminentes qualités de mon ancien patron.

Le jeune James Cartwright, haut-Canadien dont j’ai déjà parlé, mourut trois à quatre ans après son retour dans sa famille. J’ai rarement connu un jeune homme doué de plus aimables qualités : aussi fûmes-nous bien vite amis inséparables pendant les trois ans qu’il resta à Québec. Notre correspondance devint très vive quelque temps après son départ, lorsqu’à ma grande surprise elle fut interrompue tout à coup. Ne recevant