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frappé à mort, les hommes poussèrent leur hua ! ordinaire, les femmes se cachèrent un instant la tête sous leur couverte : c’était l’oraison funèbre du trépassé.

Cet Indien, âgé, je crois, de dix-huit ans, mourut avec le plus grand courage, je pourrais dire avec insouciance. En se rendant au lieu du supplice, on aurait cru que loin d’être la victime, il était un spectateur indifférent de tous les lugubres apprêts. Il avait montré la même insouciance, lorsque les chefs de sa tribu le conduisirent à Québec : je tiens d’une fille mulâtre, notre servante, qu’ils arrêtèrent chez mon grand-père à Saint-Jean Port-Joli où ils déjeunèrent : il était libre, disait-elle, et il rôdait et furetait dans toutes les chambres du manoir d’un air curieux et effronté.

Je visitais fréquemment pendant mon enfance les lieux où cet Indien fut mis à mort : c’est là que nous allions cueillir des fraises dans les prairies et les bosquets dont le cap était couvert.