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MÉMOIRES.

dant l’espace de quinze jours, après son retour, sans pouvoir s’asseoir.

Il n’en était que plus éveillé pour servir ses pratiques.

Voici maintenant ce qui m’avait inspiré cette réflexion qui me sauva la vie à l’âge de sept ans.

Mon père, pendant une des fréquentes visites qu’il faisait à son ami le Dr Oliva, lorsqu’il demeurait au bourg de Saint-Thomas, avant d’aller résider à Québec, trouva toute la famille dans une grande affliction. Frédérick, l’aîné des fils du docteur, était à la dernière extrémité.

Mon enfant n’existera plus demain, dit le célèbre médecin à son ami.

— Vous n’avez donc, lui dit mon père, aucune ressource dans votre art, pour sauver la vie à un enfant si fort, si bien constitué ?

— Oui, reprit le médecin, il m’en reste une, bien petite à la vérité, mais ma femme ne consentira jamais que je mette son enfant à une épreuve si cruelle. Si l’enfant meurt sous l’effet du traitement, on dira que je l’ai tué, et tout le monde m’accusera d’avoir été le bourreau de mon fils.

— Avez-vous annoncé à la mère l’état désespéré de votre fils ? répliqua mon père.

— Elle sait, dit M. Oliva, que l’enfant sera mort demain au matin.

— Madame Oliva, reprit mon père, est une femme d’un esprit et d’un jugement supérieurs. Elle connaît votre habileté, et elle consentira à tout. Avec l’assentiment de la mère, vous devez mépriser les cancans des commères du village.