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MÉMOIRES.

serait pas rendu coupable de cette offense. Et maintenant, monseigneur, qu’il l’a commise, vous auriez dû l’en punir, seul, et non toute la paroisse innocente de son crime.

« M. Mabane fut frappé de la justesse de l’observation, et ne put s’empêcher de rire lorsque cet homme la fit ; mais il intercéda inutilement en sa faveur, car l’évêque jugea à propos de continuer l’interdiction pendant l’espace de deux mois, et ne la leva que sur l’humble et urgente intercession de M.  et madame de Gaspé. Cette histoire me fut raconté par François Leclerc, l’un même des marguilliers qui se rendit auprès de l’évêque dans cette occasion. »

Voici un compte-rendu bien touchant de la tyrannie de l’évêque, qui avait refusé les dispenses de mariage à deux malheureux amants trop pauvres pour payer cent cinquante piastres, pour grossir la bourse de l’opulent prélat. Malheureusement pour la véracité de l’auteur, et de M. le Juge Mabane, et alii, il n’y a jamais eu de dispenses de mariage dont l’aumône (qui est toujours distribuée aux pauvres) s’élevât à cent cinquante piastres, au Canada : la plus forte, celle entre cousins germains est de cent piastres seulement ; et l’auteur admet lui-même que les liens de parenté étaient très faibles. Comment le marguillier aurait-il alors parlé de cent cinquante piastres, quand il devait savoir qu’une dizaine de piastres, tout au plus, étaient exigibles par l’Évêque ?

Cet événement a eu lieu douze ans avant ma naissance ; j’ai été quasi bercé avec cette histoire. J’ai même connu le célébrant de ce mariage. Les habitants, avec l’esprit satyrique de leurs ancêtres qui leur