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INCENDIE DE LA CÔTE SUD.

collège actuel. Le lendemain au matin, le commandant, prêt à ordonner la marche d’une des compagnies, appela le lieutenant et lui dit :

— Vous mettez le feu à toutes les habitations de ces chiens de Français que vous rencontrerez sur votre passage ; je vous suivrai à petite distance.

– Mais, dit le jeune officier qui était Écossais, faut-il incendier aussi les demeures de ceux qui n’opposent aucune résistance ? On dit qu’il ne reste que des femmes, des vieillards et des enfants dans ces habitations.

— Il me semble, monsieur, reprit le major Montgomery, que mes ordres sont bien clairs et précis : vous mettrez le feu à toutes les habitations de ces chiens de Français que vous rencontrerez sur votre passage. Mais j’oubliais votre prédilection pour nos ennemis !

Le jeune homme se mordit les lèvres à en faire jaillir le sang et mit ses hommes en marche. Dans ce jeune homme le lecteur reconnaîtra sans doute Archibald Cameron of Locheill, qui, ayant fait sa paix avec le gouvernement britannique, était entré dans sa patrie et avait obtenu une lieutenance dans un régiment recruté par lui-même parmi son clan de montagnards écossais. Arché s’éloigna en gémissant et en lâchant tous les jurons gaéliques, anglais et français que sa mémoire put lui fournir. À la première maison où il s’arrêta, une jeune femme, tout en pleurs, se jeta à ses pieds, en lui disant :

— Monsieur l’Anglais, ne tuez pas mon pauvre vieux père ; n’abrégez pas ses jours : il n’a pas longtemps à vivre.

Un petit garçon de onze à douze ans l’enlaça de ses bras, en s’écriant :