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LES ANCIENS CANADIENS.

ses, celle de notre pays était jadis lettre close pour nous.

Il s’est fait une glorieuse réaction depuis quelques années : chacun a mis la main à l’œuvre de réhabilitation ; et le Canadien peut dire comme François I : « tout est perdu fors l’honneur. » Je suis loin de croire cependant que tout soit perdu : la cession du Canada a peut-être été, au contraire, un bienfait pour nous ; la révolution de 93, avec toutes ses horreurs, n’a pas pesé sur cette heureuse colonie protégée alors par le drapeau britannique. Nous avons cueilli de nouveaux lauriers en combattant sous les glorieuses enseignes de l’Angleterre ! et deux fois la colonie a été sauvée par la vaillance de ses nouveaux sujets. À la tribune, au barreau, sur les champs de bataille, partout, sur son petit théâtre, le Canadien a su prouver qu’il n’était inférieur à aucune race. Vous avez lutté pendant un siècle, ô mes compatriotes ! pour maintenir votre nationalité, et grâce à votre persévérance, elle est encore intacte ; mais l’avenir vous réserve peut-être un autre siècle de luttes et de combats pour la conserver ! Courage et union, mes compatriotes !

Deux détachements de l’armée anglaise étaient débarqués à la Rivière-Ouelle, au commencement de juin, 1759. Quelques habitants de la paroisse, embusqués sur la lisière du bois, les avaient accueillis par une vive fusillade, et leur avaient tué quelques hommes. Le commandant, exaspéré de cet échec, résolut d’en tirer une éclatante vengeance. Les deux détachements avaient remonté la rivière, et étaient venus camper vers le soir près d’un ruisseau qui se décharge dans l’anse de Sainte-Anne, au sud-ouest du