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lampe, Anna tournait et retournait entre les doigts une petite clé.

— Pourquoi, disait-elle, pourquoi me reprendre cette clé ? Ai-je mérité d’être destituée, ai-je commis la moindre infidélité ou détourné à mon profit la moitié d’un centime ?

— Non, répondait Isaac, non, mais enfin…

— Mais enfin, donne-moi une raison, un motif ; Isaac, tu le sais, cette clé ce n’est pas seulement celle de la caisse mais c’est aussi celle de ta confiance et de notre bonheur.

— Il ne s’agit pas de çà, répondait impatiemment Isaac ; j’aurai bientôt besoin de beaucoup d’argent, je veux t’épargner l’ennui d’ouvrir et de rouvrir sans cesse ce coffre-fort, voilà le fait simple et vrai sans qu’il soit le moins du monde question, pour toi de perdre ma confiance, ni pour moi de porter atteinte à notre bonheur.

— Anna hochait la tête : Pourquoi, disait-elle, auras-tu si souvent besoin d’argent ?

— Il est vaguement question de guerre générale, les actions de tous les emprunts subissent une baisse effrayante, c’est le moment d’acheter de tout pour revendre après.

— Je n’entends rien à ce jargon ; te donnera-t-on du papier en échange de ton argent :