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VII.


À quelque temps de là, Christus qui venait d’achever un saint de bois pour l’église d’Alsemberg se rendit machinalement chez les Godin. C’était un dimanche de décembre, vers quatre heures de l’après-midi. Le ciel était bleu et profond ; derrière la ferme éclairée par un jour froid, quelques vapeurs d’un rose vitreux coupaient par bandes l’horizon. Christus entra tout droit dans la cuisine pour se chauffer. Il y vit Louise assise au coin du feu et les mains inoccupées, chose rare.

Louise était parée d’une robe de soie de couleur pensée, d’un tablier noir et chaussée de fines bottines de prunelle. Elle portait tous ses bijoux. Christus s’approcha d’elle : elle embaumait les violettes. Pourquoi Louise embaumait-elle ce jour-là les violettes ? Pourquoi si bien parée ? Christus eut un battement de cœur ; elle lui parut rajeunie de dix ans. Par quel miracle de volonté la pauvre fille en était-elle arrivée là ? Elle regarda Christus de ses grands yeux cernés pleins de passion et de fièvre.