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Et qu’il faille chanter, ô ma Muse folâtre !
Car je vous aurais dit : « Le feu brille dans l’âtre,
La verte salamandre y sautille en rêvant ;
Laissons tomber la pluie et soupirer le vent,
Car les sophas sont doux loin des regards moroses,
Et nos verres de vin sont pleins de rayons roses. »
   Mais Karr peut seul flâner aux grèves d’Étretat.
Un dieu ne nous fit pas ces loisirs : notre état,
C’est de fouetter au sang, comme Croquemitaine,
Tous les petits vauriens, d’une façon hautaine.
Nous leur faisons bien peur ! Heureusement je vois
Que mon Croquemitaine, avec sa grosse voix,
Avale à belles dents les bonbons aux pistaches,
Porte des bas à jour et n’a pas de moustaches.
La moustache irait mal avec sa douce peau.
   Mais nous perdons du temps ! Jetez là ce chapeau,
La robe, les jupons ; tirez cette baleine,
Ce bas de cachemire avec sa blanche laine ;
Otez ce joyau d’or et ce petit collier.
Il faut, ma chère enfant, vous mettre en cavalier.
Nous allons dans un bouge où, tout le long du drame,
L’on est fort exposée en costume de femme.
Passez ce pantalon et ces bottines, qui
Viennent de chez Renard et de chez Sakoski ;