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ODES FVNAMBVLESQUES.


Au fond de ces séjours à pompe triomphale,
Où brillent aux flambeaux les cheveux de maïs,
Hercule enrubanné file aux genoux d’Omphale,
Et Diogène dort sur le sein de Laïs.

Salut, jardin antique, ô Tempé familière
Où le grand Arouet a chanté Pompadour,
Où passaient avant eux Louis et La Vallière,
La lèvre humide encor de cent baisers d’amour !

C’est là que soupiraient aux pieds de la dryade,
Dans la nuit bleue, à l’heure où sonne l’angelus,
Et le jeune Lauzun, fier comme Alcibiade,
Et le vieux Richelieu, beau comme Antinoüs.

Mais ce qui me séduit et ce qui me ramène
Dans la verdure, où j’aime à soupirer le soir,
Ce n’est pas seulement Phyllis et Dorimène,
Avec sa robe d’or que porte un page noir.

C’est là que vit encor le peuple des statues
Sous ses palais taillés dans les mélèzes verts,
Et que le chœur charmant des Nymphes demi-nues
Pleure et gémit avec la brise des hivers.