Page:De Banville - Odes Funambulesques.djvu/331

Cette page n’a pas encore été corrigée

où le culte de la rime eût exigé impérieusement que Nadaud écrivît Mogador et... Claria. ―

Pomaré, qui se nommait en réalité Élise Sergent, fut une des figures les plus étranges du temps où nous étions jeunes. A tous les bals masqués de l’Opéra, on la voyait invariablement vêtue en homme, avec un costume très correct de gentleman, habit, pantalon et gilet noirs, cravate blanche et paletot blanc qu’au moment de la sortie elle reprenait au vestiaire, avec une badine qu’elle tenait avec le sans-façon le plus gracieux dans sa main gantée de blanc. A ces bals elle passait toute la nuit à causer avec des écrivains ou des artistes, ne les quittant pas, ayant autant d’esprit qu’eux, allant souper avec eux lorsque l’heure était venue, et ne jouant en aucune façon le personnage de femme. Elle et ses amis allaient habituellement chez Vachette (remplacé aujourd’hui par Brébant,) non dans les cabinets particuliers dont elle avait horreur, mais dans la salle commune. Elle s’y tenait comme un homme du meilleur monde, mais pourvu qu’il n’y eût pas là de bourgeoise, car Pomaré nourrissait contre les bourgeoises une haine instinctive et frivole. Si le malheur voulait qu’en