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ARISTIPPE

puiſſante. Ils ont dit que les Amis eſtoient les plus vtiles, & les plus deſirables des Biens eſtrangers. Ils les ont conſiderez, non pas comme les ioüets & les amuſemens d’vn Sage en peinture, mais comme les aides & les appuis d’vn homme du Monde.

Il n’y a que Dieu ſeul, qui ſoit pleinement content de ſoy-meſme, & de qui il faille parler en termes ſi hauts & ſi magnifiques : Il n’y a que luy, qui, eſtant riche de ſa propre eſſence, iouïſſe d’vne Solitude bienheureuſe, & abondante en toutes ſortes de biens ; luy qui puiſſe operer ſans inſtrumens, comme il agit ſans trauail ; luy qui tire tout du dedans de ſa nature, parce que les choſes en ſont ſorties de telle façon, qu’elles ne laiſſent pas d’y demeurer. Les Hommes au contraire ne peuuent, ni viure, ni bien viure ; ni eſtre hommes, ni eſtre heureux, les vns ſans les autres. Ils ſont attachez enſemble, par vne commune neceſſité de commerce. Chaque Particulier n’eſt pas aſſez de n’eſtre qu’vn, s’il n’eſſaye de ſe multiplier