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NOVEMBRE 1769.

pondre à l’anonyme. Il a répandu une prétendue Lettre de M. Jérome, râpeur de tabac, à M. Raphaël[1]. On sait qu’en pareil genre tout le succès consiste dans cette première fleur de critique qu’il faut saisir, et qui se fane pour peu qu’on la remanie. Aussi l’ouvrage de l’apologiste du salon a-t-il paru froid, diffus, lourd, bassement écrit, et né sous une main plus accoutumée à manier la truelle que la plume. Ce n’est pas que M. Sédaine n’ait un mérite, même littéraire ; mais ce n’a jamais été celui du style, et c’est la principale chose dans les écrits du genre en question. On attribue aujourd’hui plus constamment la Lettre de Raphaël[2] à M. le comte de Lauraguais dont on connaît le goût pour tous les arts.

2. — Dieu et les Hommes, œuvre théologique mais raisonnable, par le docteur Obern, traduit par Jacques Aimon. Tel est le titre d’un volume in-8° de deux cent quatre pages, qui repaît en ce moment la curiosité des incrédules. En effet, cette œuvre, prétendue théologique, n’est qu’une œuvre du diable, et n’en est que plus courue. Le fond, très-rebattu, est enrichi des grâces du style, et les connaisseurs y reconnaissent la touche du philosophe de Ferney. Cet auteur infatigable a voulu, sans doute, donner matière à une nouvelle abjuration pour l’année prochaine, lorsqu’il fera ses pâques avec la ferveur dont il édifie le public depuis deux ans.

3. — M. l’abbé Delaunay, qui se dispose à donner un recueil de pièces fugitives pour servir de supplément aux ouvrages des auteurs vivans, a écrit à M. Piron pour lui demander communication des siennes. Ce poète plus qu’octogénaire, mais tout brûlant encore du feu sacré

  1. Paris, Jombert, 1769, in-8°. — R.
  2. V. 29 septembre 1769. — R.