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MEMOIRES SECRETS.

où il se trouvait, il s’est remis de la frayeur qu’il avait d’abord ressentie en arrivant, et a parlé avec beaucoup de présence d’esprit, de fermeté et d’éloquence. C’est un nommé Le Brun, ci-devant Jésuite, son secrétaire intime auquel on attribue cette harangue.

25. — Il court un vaudeville en cinquante couplets contre cinquante demoiselles de l’Opéra : il en est peu qui n’y soient très-maltraitées ; aussi le théâtre lyrique est-il dans une grande fermentation pour découvrir l’auteur de ces calomnies et le faire punir sévèrement. Il a jugé à propos de distinguer mademoiselle Rosalie, et a fait en particulier pour elle un Cantique servant de suite au premier[1], qui ne chante rien moins que ses louanges, et qui part à coup sûr d’un ennemi très-ulcéré. Ces nouveautés intriguent beaucoup les amateurs, et font une grande sensation parmi eux.

27. — Malgré la réclamation presque universelle de la France mourant de faim, demandant du pain, et maudissant l’exportation, malgré l’examen de la question faite par plusieurs Compagnies souveraines dont quelques-unes même, après avoir adopté le nouveau système, s’en sont désistées ensuite en rendant des arrêts prohibitifs, les économistes persistent dans leur raisonnement, et répliquent à tout ce qu’on a dit et fait par une réponse spécieuse d’abord, mais qui peut se réduire à rien. Le sieur Dupont, le rédacteur des Éphémérides et le secretaire de la secte, prétend dans des Observations sur les effets de la liberté du commerce des grains et sur ceux des prohibitions, que les réglemens pareils à ceux qu’on sollicite aujourd’hui ont produit beaucoup de disettes, et en cent vingt-trois ans ont occasioné soixante-cinq

  1. V. 26 décembre 1770. — R.