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MEMOIRES SECRETS.

de quelques drames, en le priant de le faire le plus polisson, le plus ordurier qu’il serait possible. Il y avait d’honnêtes femmes à ce spectacle, mais en loge grillée ; car ce sont les filles qui occupent l’assemblée et remplissent la salle.

25. — La Cour des Aides avait arrêté qu’il serait fait des remontrances au roi sur l’enlèvement, à Compiègne, des deux magistrats de la députation du Parlement de Bretagne. Ce Parlement étant aussi Cour des Aides dans son ressort, celle de Paris, comme fraternisant avec elle, avait cru ne pouvoir se dispenser de ce devoir ; mais le roi a trouvé cette démarche déplacée, et n’a pas voulu les recevoir. Ces remontrances, conséquemment, sont restées consignées au greffe d’où elles semblaient ne devoir sortir ; mais quelque copiste infidèle en a laissé transpirer des exemplaires manuscrits, et le public les recherche avec avidité. Elles sont courtes, et retracent d’une façon énergique le cruel tableau des proscriptions et des tyrannies exercées en Bretagne ; elles en désignent les auteurs avec des couleurs vraies et effrayantes ; elles attaquent enfin et renversent ces maximes terribles dont les adulateurs du trône font la base du pouvoir des rois, ou plutôt des despotes. On peut leur reprocher un ton de dureté qu’on sent naître de l’indignation de l’âme libre et fière qui les a suggérées, mais qu’on trouve toujours déplacé en parlant à un souverain. On les attribue à M. de Malesherbes, premier président de cette cour, et elles sont en effet dans son style[1].

26. — Un baron allemand, officier dans le régiment

  1. L’auteur de l’article Malesherbes de la Biographie universelle s’afflige en pensant que de telles représentations étaient adressées à l’un de nos meilleurs rois. — R.