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MEMOIRES SECRETS.

grand prince, et qu’elle trouve, ainsi que faisait madame Senac et que à d’autres feraient, la jalousie de son mari très-déplacée.

4. — Le sieur De Rosoy entré à la Bastille le samedi 13 mai, en est sorti le samedi 21 juillet, après avoir expié son double crime littéraire d’avoir fait imprimer sans permission les deux ouvrages dont on a parlé, savoir les Jours d’Ariste et le Nouvel Ami des hommes, et d’avoir inséré dans l’un et dans l’autre des maximes nouvelles et hardies que le Gouvernement désapprouve, et qu’il a voulu réprimer. Le premier traité roulait sur la morale, et le second sur la politique. Il prétend que madame la duchesse de Grammont et M. le duc de Choiseul ont beaucoup contribué à son élargissement.

Quant à sa requête au chancelier contre le sieur Palissot, voici ce qu’il raconte. Une vingtaine de petits auteurs, à la tête desquels était le sieur Baculard d’Arnaud, sont venus le trouver pour l’engager à se joindre à eux et à solliciter auprès du chef de la librairie une défense au sieur Palissot de faire paraître la suite de sa Dunciade, dont ils redoutaient la publicité. Pour mieux l’exciter, ils lui ont rapporté ce que le poète satirique y disait de lui, et les anecdotes scandaleuses qu’il y mettait sur son compte. Alors, sans vouloir faire aucune ligue, après avoir vérifié ce qui le concernait, il avait effectivement porté plainte au chef de la magistrature, par le lieutenant-général de police, contre le sieur Palissot, pour son propre compte, et sur ce qui le concernait seulement, en prévenant M. de Sartine de la réclamation générale qui devait suivre ; mais il se plaint que ses lâches compagnons l’aient abandonné, et n’aient osé se joindre à lui dans un projet qu’ils lui avaient suggéré.