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MEMOIRES SECRETS.

livre, et que, dans le cas même où il aurait parole de M. le procureur général de n’être pas inquiété, on l’assure, il ne faut qu’un membre de la compagnie de mauvaise humeur pour le dénoncer au Parlement, s’il ne garde pas plus de réserve dans l’incognito qu’il doit toujours conserver ici.

2. — On parle d’un Dialogue des morts nouveau. Cette facétie a été faite à l’occasion de la catastrophe de la nuit du 30 au 31 mai, qui n’est rien moins que plaisante. On suppose que les gens morts dans la bagarre arrivent en foule chez Pluton. Ce dieu est surpris de cette débâcle. Il les interroge sur le sujet de leur venue, et demande pourquoi ils ne sont pas restés à la noce ? Ce qui amène un détail des circonstances de l’aventure malheureuse, et une satire amère contre ceux qui auraient dû la prévenir. On y joint divers éloges, et entre autres celui de M. de Sartine, qu’on disculpe à tous égards.

3. — Le Français met tout en chanson. Voici un couplet qu’on a fait sur la terminaison du procès de M. le duc d’Aiguillon[1]. Il est sur un air du Déserteur :

Oublions jusqu’à la trace
De mon procès suspendu ;
Avec des lettres de grâce
On ne peut être pendu.
Je triomphe de l’envie,
Je jouis de la faveur :
Grâces aux soins d’une amie,
J’en suis quitte pour l’honneur.

  1. Le Parlement de Paris, qui avait évoqué à lui le procès intenté au duc d’Aiguillon par le Parlement de Bretagne, le déclara « prévenu de faits qui entachaient son honneur. » Aidé de la protection de madame Du Barry, d’Aiguillon fit enlever du greffe du Parlement toutes les pièces de sa procédure, qui fut ainsi anéantie. — R.