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JANVIER 1770.

que M. de Voltaire a trop prodiguées depuis quelque temps dans les agréables productions qu’il ne cesse d’enfanter dans sa retraite. Cette brochure-ci, écrite avec autant de chaleur que d’onction, est une espèce de sermon moral, ou de plaidoyer en faveur du peuple. Après une peinture aussi vraie que touchante des calamités accumulées sur cette nombreuse portion de l’humanité, il attaque la Quadragésime et les fêtes, division naturelle de ce petit discours. Quant au carême, il fait sentir l’absurdité de l’arbitraire, dans les Commandemens de l’Église, de laisser un homme maître à son gré de prescrire les alimens qu’on mangera, et de forcer à jeûner et à faire maigre des malheureux ne mangeant presque jamais de viande et toujours mourant de faim. Il exhorte les magistrats à décider si la différence du sol n’exige pas une différence dans les lois, et si cet objet n’est pas essentiellement lié à la police générale, dont ils sont les administrateurs. Dans cette première partie donc, le peuple demande la permission de vivre. Dans la seconde, il demande la permission de travailler, par la suppression de ces fêtes, dont M. de Voltaire prouve l’inutilité, l’indécence et le danger. Il prouve encore que la puissance législative, ayant seule institué le dimanche, c’est à elle seule à connaître de la police de ce jour, comme de tous les autres ; qu’en un mot, l’agriculture doit dépendre des magistrats, et non du sacerdoce ; que c’est aux juges qui sont sur les lieux à examiner quand la culture est en péril, et non à un évêque renfermé indolemment dans son palais.

20. — M. de Voltaire n’a pu se contenir avec la même réserve dans la petite brochure intitulée : les Adorateurs, ou les Louanges de Dieu : ouvrage unique de M. Imhoff,