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MEMOIRES SECRETS.

M. Luneau, dans son nouveau Mémoire, plus approfondi que les premiers, remonte à l’origine des Libraires, qui avant la découverte de l’imprimerie étaient dans la plus humilante, la plus servile dépendance des gens de lettres, entièrement aux ordres et aux gages de l’Université. On les appelait alors Stationarii, c’est-à-dire entreposeurs, comme servant précisément et uniquement au courtage des livres peu communs alors. Elle avait sur eux le droit d’inspection, de correction, et elle en usait. Il réfute victorieusement leur assertion, par laquelle ils prétendent n’être pas confondus avec les autres espèces de négoces, et distinguer dans la librairie une partie purement matérielle, qu’ils dédaignent, et une partie purement spirituelle, qu’ils s’approprient. Il fait voir, au contraire, qu’ils n’occupent qu’un rang très-peu distingué dans l’ordre des vanités sociales, qu’ils sont exclus de l’échevinage de Paris, espèce d’apothéose bourgeoise, à laquelle peuvent être admises des communautés de marchands, au-dessus desquels ils voudraient s’élever, et qu’enfin le souverain lui-même les a assimilés quelque fois aux états mécaniques les plus vils.

30. — M. le président Le Monnier rentre de nouveau en lice contre M. de Valdahon[1], à l’occasion de mademoiselle Le Monnier, qui depuis qu’elle est majeure lui a fait des sommations respectueuses pour épouser son amant, dont la constance a été mise à de si rudes épreuves. Tous les papiers publics ont parlé si souvent et d’une façon si intéressante du procès célèbre qui dure depuis sept ans entre ce premier président de la chambre des Comptes de Dôle, et le Mousquetaire gris, qu’on s’en souvient sûrement et que les cœurs

  1. V. 4 avril 1765. — R.