Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 2 - 1766-1769 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/381

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
377
DÉCEMBRE 1768

l’auteur[1] attribue les droits du despotisme le plus rigoureux au roi de France ; que regardant l’établissement de l’impôt comme une marque distinctive de la majesté suprême, il ne met point de bornes à cette ressource malheureuse ; qu’il veut qu’on puisse lever les subsides sur les peuples, sans admettre la nécessité absolue de l’enregistrement dans les tribunaux ; qu’il propose d’exclure de toute charge et de tout emploi public les célibataires ; qu’il veut que les rois puissent à leur gré s’emparer des biens de l’Église ; que l’on diminue le nombre des charges qui donnent la noblesse ; qu’on en augmente considérablement le prix, et que l’on supprime presque tous les tribunaux, le Parlement, selon lui, étant plus que suffisant pour administrer la justice à tous les sujets du roi et remplacer les tribunaux chargés de veiller à l’établissement des impôts, à la perception et à la fidélité de leur manutention et à leur exacte comptabilité. En conséquence la Chambre a ordonné, le 21 novembre, le rapport de M. Athanase-Alexandre Clément de Boissi, conseiller-maître aux semestres assemblés le 23 du même mois, et ledit jour a supprimé ledit livre, comme contraire à l’honneur et au respect dus à la magistrature, et notamment à la juridiction de la Chambre ; fait défenses à tous imprimeurs, libraires, colporteurs et autres, d’imprimer, vendre, ou autrement distribuer ledit livre, à peine de trois mille livres d’amende, etc.

Le réquisitoire, assez bien fait dans son genre, est un monument précieux d’un homme public qui, par les circonstances, n’est pas dans le cas de porter beaucoup la parole dans un tribunal sans auditoire. Au reste, il est

  1. Damiens de Gomicourt. — R.