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MÉMOIRES SECRETS

France que celui de Danemark ne payât rien pour ses loges, et ceci est une gratification spéciale pour servir de marque de sa satisfaction. On ne sait encore comment ont été traités les autres spectacles.

12. — L’A. B. C., dialogues curieux, traduits de l’anglais de M. Hut. À ce titre baroque et factice, on reconnaît aisément l’auteur de la brochure, ce Protée littéraire qui depuis quelques années prend toutes sortes de formes, non pour tromper ses semblables, comme celui de la fable, mais pour les éclairer et les instruire. Que de métamorphoses n’a-t-il pas fait subir à la vérité dans l’espoir de la faire recevoir enfin de quelque façon. L’ouvrage en question n’est pas un tout complet, mais un assemblage de plusieurs chapitres roulant sur la politique, la morale, la métaphysique. Quant à la première partie, le dissertateur prouve l’excellence de la constitution anglaise et des lois de ce gouvernement. Ce qu’il dit sur la seconde est, comme tout ce qui sort de sa plume, plein d’onction et d’humanité. La troisième est plus vague. Notre philosophe, ainsi que les autres, se perd dans un labyrinthe de doutes et de conjectures. Il est également inconséquent et contradictoire. M. de Voltaire a saupoudré ce traité de cette critique ingénieuse dont il assaisonne tout ce qu’il fait. Il passe surtout en revue Hobbes, Grotius et Montesquieu, et saisit ingénieusement leurs côtés faibles. On sent que la religion doit entrer pour beaucoup dans cette brochure philosophique. On commence par y prouver un Dieu, qu’on finit par détruire, et le spinosisme paraît le vrai système de l’auteur.

12. — On parle beaucoup des spectacles magnifiques que donne, à sa superbe maison de Pantin, mademoi-