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DÉCEMBRE 1768

3. — Extrait d’une lettre de Ferney, du 25 novembre 1768.

« M. de Voltaire se porte toujours à merveille pour son âge. Il ne voit plus personne, et semble redoubler d’assiduité au travail. Son Siècle de Louis XV imprimé. Il est en deux volumes, de la même étendue à peu près que celui de Louis XIV et dans le même goût. Il le conduit jusqu’en 1766. Je ne vois rien de bien hardi dans cet ouvrage, et qui doive l’empêcher de pénétrer chez vous. Ce qui m’y a paru le plus singulier, c’est la chaleur avec laquelle l’auteur justifie M. de Lally.

« Vous êtes curieux de savoir s’il donnera en 1769 le spectacle édifiant qu’il a donné en 1768 ; on ne peut rien promettre d’un homme aussi inconséquent et aussi variable. Sa dévotion paraît fort ralentie, et il prétexte souvent quelque incommodité pour ne point aller à la messe. Au reste, cette farce a si mal pris la première fois, qu’il pourrait se dispenser de récidiver. »

5. — Il paraît qu’entre les divers spectacles donnés à Chantilly, la comédie du Bourgeois gentilhomme, avec tous ses agrémens et divertissemens, est ce qui a fait le plus de plaisir au roi de Danemark, dont on ne saurait mieux apprécier le goût et la philosophie qu’en vantant le cas extrême qu’il fait de Molière. Tout le reste, d’ailleurs, a répondu aux vues du prince de Condé, et la partie dramatique est ce qui a été le mieux exécuté. Aussi ce prince a-t-il récompensé tous les acteurs principaux de l’Opéra et des deux Comédies qui ont concouru aux divertissemens qu’il a voulu donner à cette Majesté. Ils ont reçu