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MÉMOIRES SECRETS

jourd’hui de son droit de présider le Parlement. En conséquence il s’y est rendu ce matin sur les dix heures, et a siégé à la grand’chambre avec tout l’appareil usité en pareil cas. Il était accompagné de quatre conseillers d’État et de quatre maîtres des requêtes. Il s’est mis à la place du premier président, c’est-à-dire dans l’angle. Le premier président s’est reculé à sa gauche, à la tête du grand banc, où étaient, comme d’ordinaire, les présidens à mortier. Sur le même rang, mais un peu plus bas, étaient les clercs. À la droite étaient les quatre conseillers d’État ; ensuite les conseillers d’honneur, les maîtres des requêtes, puis le doyen des conseillers laïcs et tous lesdits conseillers. Le chancelier a fait un discours très-applaudi, où il a témoigné son attachement pour la compagnie, avec toutes les grâces enchanteresses dont il accompagne ce qu’il dit. Le premier président lui a répondu, et M. le premier avocat-général Séguier a pris occasion de la présentation d’un avocat pour encenser à son tour le chef de la magistrature.

Le sieur Legouvé, cet avocat qui avait essuyé la mortification dont on a parlé[1], le jour que le roi de Danemark vint au Parlement, et qui, en conséquence, avait eu le dessein de ne plus paraître au barreau, n’a pu se refuser aux instances de M. le chancelier, qui avait exigé de lui qu’il plaidât. Il a repris sa cause ; il y a mis plus d’honnêteté, et a plaidé avec autant d’éloquence que de discrétion. Il n’a point été en reste avec les autres orateurs qui avaient parlé avant lui, et a également adressé un compliment convenable dans les circonstances. Il a été dédommagé, par les suffrages qu’il a obtenus aujourd’hui, des huées de l’autre jour.

  1. V. 24 novembre 1768. — R.