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MÉMOIRES SECRETS

admiration il a demandé pour qui était destiné cet ameublement ? « Pour Votre Majesté, » lui a répondu le duc de Duras.

30. — Les Comédiens Italiens ont donné hier la seconde représentation des Sabots, opéra comique en un acte, mêlé d’ariettes, du sieur Sédaine. Ce petit drame naïf, et dans le vrai genre de son auteur, a été joué jeudi devant le roi de Danemark, qui n’a pas goûté extrèmement la musique. Elle est du sieur Duni, et simple comme le sujet. Mais ce monarque, accoutumé a la musique italienne, ne peut se faire à la nôtre. Notre Opéra, par la même raison, a le talent de l’ennuyer, comme tous les étrangers. Les ballets cependant paraissent le frapper davantage, et il sent toute la supériorité de notre chorégraphie.

31. — On continue à s’entretenir du roi de Danemark, dont on admire les réponses ingénieuses. Chacun s’efforce de mériter quelque chose de flatteur de sa part. On s’évertue aussi, et l’on se répand en saillies pour plaire à ce prince aimable. On cite de nouveaux bons mots de ce monarque et de ceux qui ont l’honneur de l’approcher. Nous en choisirons quelques-uns seulement. Dans un souper qu’il fit chez le roi, Sa Majesté lui demanda quel age il donnait à madame de Flavacourt, qui paraissait l’enchanter ? Il répondit trente ans. « Elle en a plus de cinquante, » dit le roi. — « Sire, c’est une preuve qu’on ne vieillit point à votre cour. »

4 Novembre. — Les trois Empereurs en Sorbonne, espèce de conte en vers que M. de Voltaire met aujourd’hui sous le nom de l’abbé Caille. Il n’approche pas de la fable du Marseillais et le Lion. C’est un cadre où il a voulu enchâsser de nouvelles injures contre la Sorbonne