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MÉMOIRES SECRETS

bassadeur a fait sentir que le prédécesseur de son maître ne jouait pas un assez beau rôle dans cette tragédie pour qu’un pareil spectacle pût lui être agréable. M. Marmontel comptait bien raccommoder tout cela, mais le sieur Poinsinet a trouvé mauvais que l’académicien voulût le corriger sans son aveu. Il a fait intervenir M. le comte de Saint-Florentin ; et pour remédier à ces tracasseries, il a été décidé qu’on laisserait Ernelinde dans l’obscurité et elle est rentrée.

11. — Les presses infernales de l’étranger ne cessent de gémir. Une production abominable vient d’en sortir encore. Elle a pour titre : Lettres a Eugénie, ou Préservatif contre les préjugés[1], avec cette épigraphe :

Relligionum animos nodis exoAretis
Relligionum animos nodis exsolvere pergo.


Il est aisé de juger par cette espèce de tocsin, quels principes ce livre doit contenir. Il est en douze lettres, faisant deux parties. Dans la première, on retrouve ce qu’on a dit cent fois sur les sources de la crédulité, sur la nécessité d’examiner la religion, sur les idées absurdes, affreuses même qu’elle donne de la Divinité. On examine les Écritures, l’économie du christianisme et les preuves sur lesquelles il se fonde, ses dogmes fondamentaux, celui de l’immortalité de l’âme, et celui de l’autre vie ; enfin les mystères, les sacremens, les cérémonies religieuses, les pratiques ou exercices de piété, les prières, les austérités, etc. L’auteur ne fait que remanier tous les raisonnemens employés par les incrédules ; mais ils sont ici développés, étendus, délayés en quelque sorte dans une infinité d’idées accessoires, qui, en leur faisant

  1. Par d’Holbach, Londres (Amsterdam, M.-M. Rey), 1768, in-8°. — R.