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MÉMOIRES SECRETS

enchâsser des hors-d’œuvre qui reviennent si souvent qu’ils font tort à la pureté des intentions de l’auteur.

27. — Jacques-Bernard Durcy de Noinville, président honoraire au Grand-Conseil, est mort il y a quelques jours[1] : il était académicien libre de l’Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres, et membre de la Société royale de Londres.

M. Piron, qui, dans un âge encore plus avancé que M. de Voltaire, conserve, ainsi que lui, tout le feu de sa jeunesse, et toujours son rival quand il s’agit de faire assaut d’esprit et de sarcasmes, s’est permis une saillie à l’occasion de la longue Épître du dernier au vaisseau baptisé sous son nom : il l’adresse au négociant propriétaire du bâtiment, et s’écrie :

Si j’avais un vaisseau qui se nommât Voltaire,
Sous cet auspice heureux j’en ferais un corsaire.

M. de Moissy, connu au Théâtre Italien par quelques pièces jouées avec succès, vient de s‘essayer au Théâtre Français, où il n’a pas été aussi heureux. On a donné aujourd’hui ses Deux frères ou la Prévention vaincue, comédie en cinq actes et en vers. Comme l’auteur est aimé et qu’il n’y avait point de cabale, on a supporté patiemment tout l’ennui de ce drame mortel, sauf à n’y plus revenir. En effet, il paraît qu’il n’y aura pas de représentations. Cette chute subite dispense de faire aucune analyse de la pièce. En général on a reconnu que M. de Moissy avait une stérilité peu propre a soutenir un ouvrage d’une pareille étendue. Point d’ensemble point de cohérence dans les actes et dans les scènes, un style trivial et souvent bas, des détails peu nobles et[illisible]

  1. Le 20 juillet. — R.