25. — Épître a M. le marquis de ***,
À toi, l’enfant gâté de la coquetterie,
Qui d’un air gai, libre et charmant
Sais dans le même instant
Baiser la main de la tendre Sylvie,
Enflammer d’un coup d’œil la sensible Égérie
Et presser le genou tremblant
De la douce Isménie ;
Toi qui soupires en riant,
Qui traites l’Amour en enfant.
À ton système enfin me voilà plus docile ;
Des Céladons, des Amadis,
J’abjure l’exemple imbécile,
C’est toi, fripon, qui m’as appris
Qu’il n’est qu’un seul plaisir pour les cœurs trop épris,
Et que le vrai bonheur est pour les infidèles,
Ah ! que l’Amour n’a-t-il quatre ailes !
Un seul objet peut-il nous rendre heureux ?
J’aime à voir une fleur que je trouve jolie ;
Mais quel plaisir de promener mes yeux
Sur l’émail varié d’une belle prairie !
J’aime, à la fraîcheur du matin,
À caresser l’incarnat d’une rose,
Qu’en secret je vois éclose
Dans un vase isolé de mon petit jardin ;
Jaime à sentir le parfum qu’elle exhale ;
Mais jamais ce plaisir n’égale
La vivacité, les douceurs,
Le charme que j’éprouve aux champs de la Provence,
Quand le soleil ornant avec magnificence
Et la terre et les cieux des plus belles couleurs,
La troupe des Zéphyrs que guide l’Inconstance
Ravit par ses baisers l’esprit de mille fleurs