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MÉMOIRES SECRETS

frémissemens convulsifs qu’elles avaient éprouvés. On ne donnera ce spectacle que deux fois par semaine, à cause de Molé, dont le rôle est très-fort, et dont la poitrine pourrait ne pas suffire à un service plus répété. Tout est loué jusqu’à la sixième représentation.

12. — On a parlé[1] d’une déclaration de M. de Voltaire en date du château de Ferney, pays de Gex en Bourgogne, le 31 mars 1768. Elle disculpe vaguement M. de La Harpe et porte sur les mêmes procédés articulés dans la Gazette d’Utrecht, qui sont en effet étrangers au vrai grief de ce jeune homme. On voit facilement que l’humanité a dicté cet écrit à celui qui l’a tant célébré. Quoi qu’il en soit, il paraît que M. Boutin, intendant des finances, n’a pas eu grande foi à ce certificat. M. de La Harpe était entré chez lui comme secrétaire intime ; il l’a congédié sous prétexte qu’ayant une femme, cela entraînerait une suite de procédés trop gênans. Il est plus vraisemblable que ce protecteur, ne sachant à quoi s’en tenir, d’après les bruits injurieux à l’âme de M. de La Harpe, a craint d’élever un serpent dans son sein. D’ailleurs, M. de La Harpe, en se consacrant au service de M. Boutin, annonçait bien la perte de tout espoir de rentrer en grâce auprès de M. de Voltaire.


13. — Sur la tragédie de Béverley,
Imitée de l’anglais par M. Saurin.

Grace à l’anglomanie, enfin sur notre scène
Saurin vient de tenter la plus affreuse horreur :
En bacchante on veut donc travestir Melpomène.
Racine m’intéresse et pénètre mon cœur
RaSans le broyer, sans glacer sa chaleur.

  1. V. 20 avril 1768, — R.