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MÉMOIRES SECRETS

sensation qu’il a faite aujourd’hui. On a trouvé dans son drame une adresse d’intrigue, une vivacité de dialogue, un piquant de style, qui lui ont procuré tous les suffrages. On ne peut dissimuler que le jeu des acteurs n’ait infiniment contribué à ce succès : Molé surtout s’est distingué par les grâces et par le feu qui lui sont naturels, mais où il s’est en quelque sorte surpassé lui-même. On a demandé unanimement l’auteur, qui a paru avec la modestie convenable dans un triomphe.

26. — Il n’est point de passion que le temps n’use à la fin. Mademoiselle Clairon est dans la plus grande désolation ; M. de Valbelle, sur le cœur duquel elle comptait au point de se flatter de l’épouser, vient de la jeter dans le désespoir par une apparition subite qu’il a faite après une longue absence, et un retour encore plus rapide en Provence, où il est, dit-on, éperduement épris d’une femme de considération.

— Les directeurs de l’Opéra, pour se dédommager du peu de monde qu’ils ont à leur spectacle, ont imaginé de former des quadrilles pour les bals, qu’ils ont composés des danseuses les plus élégantes et les plus agréables, avec des habillemens très-propres a exciter la curiosité. Ce genre varié d’amusemens attire beaucoup de gens, amateurs de la nouveauté.

27. — Les Italiens ont donné aujourd’hui la première représentation des Moissonneurs, comédie en trois actes et en vers, mêlée d’ariettes. Les paroles sont de M. Favart, et la musique est de M. Duni. Quant au drame, c’est exactement l’histoire de Booz, de Ruth et de Noémi. Il est singulier de voir un tel sujet présenté sur un pareil théâtre. Quelque susceptible qu’il soit de morale et d’intérêt, il prête peu à la gaieté, aux sar-