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NOVEMBRE 1767

gros ménage. À l’arrivée de cet homme célèbre, non attendu, et plus encore sur l’annonce qu’il lui donne de madame Gaulard et sa compagnie, qui vont arriver, elle le quitte pour donner des ordres, lui demandant la permission de s’absenter quelques minutes. Elle recommande à sa fille d’entretenir monsieur, et de faire les frais de la conversation ; elle sort. La demoiselle était jolie, et agnès plus qu’on ne l’est sans doute en sortant de beaucoup de couvens. Quoi qu’il en soit, le sieur Marmontel s’évertue, s’oublie, profite de l’innocence de la jeune personne, et devient fort entreprenant. Sur ces entrefaites la mère revient, fait ses excuses à notre académicien, lui témoigne ses regrets de l’avoir laissé, dit qu’elle craint qu’il ne se soit ennuyé. Il répond, proteste, jure que point du tout, que mademoiselle sa fille a de l’esprit comme un ange ; qu’il s’est fort amusé. La mère se retourne vers elle, témoigne à sa fille combien elle souhaiterait que cette effusion ne fût pas une affaire de politesse… M. Marmontel riposte de nouveau qu’il n’y a rien de plus vrai, qu’il a eu beaucoup de plaisir. La petite, impatiente, répond vivement : « Il ment, maman, il ment. Le beau plaisir de manier le cul des gens avec des mains froides comme glace… » On ne peut entreprendre de peindre l’état de la mère et du sieur Marmontel ; il n’attendit pas le compliment qu’il méritait, et remonta brusquement en voiture.

18. — On a vu un écrit publié sous l’intitulé de Cas de conscience proposé et décidé par des soi-disant théologiens et canonistes, au sujet de la commission royale pour l’examen des réguliers. C’est l’ouvrage attribué à dom Clémencet. Un anonyme vient d’y répondre sous le