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MÉMOIRES SECRETS

28. — Le Panégyrique de Saint-Louis, prononcé le 25 de ce mois dans la chapelle du Louvre par M. l’abbé Bassinet, grand vicaire de Cahors, fait grand bruit. On lui reproche d’avoir converti en cérémonie absolument profane cet éloge, consacré spécialement au triomphe de la religion. Il en a supprimé jusqu’au signe de croix. Point de texte, aucune citation de l’Écriture, pas un mot du bon Dieu, ni de ses Saints. Il n’a envisagé Louis IX que du côté des vertus politiques, guerrières et morales. Il a frondé les croisades, il en a fait voir l’absurdité, la cruauté, l’injustice même. Il a heurté de front et sans aucun ménagement la cour de Rome ; en un mot, tous les dévots sont alarmés, ils traitent d’athée cet ecclésiastique, et l’on craint qu’on n’arrête l’impression du Panégyrique.

29. — Il paraît une Lettre sur les Panégyriques, que l’on attribue à M. de Voltaire ; et, en effet, elle semble être de lui, à en juger par le style et son art de présenter les choses les moins intéressantes d’une façon piquante. Elle est courte et n’a que quinze pages. L’auteur, comme il lui arrive souvent, tombe dans le défaut qu’il veut corriger, et a tant mérité le reproche qu’il fait aux autres, qu’il a mauvaise grâce de le relever. Au reste, cet écrit est si peu de chose, qu’on n’en parlerait pas s’il ne sortait de la plume de cet homme célèbre.

3. Septembre. — La censure de la Sorbonne contre le Bélisaire est arrêtée par le gouvernement, au sujet de certaines assertions qu’il ne veut pas passer. Les sages maîtres, après avoir établi l’intolérance religieuse comme un principe du christianisme, prétendent que l’intolérance civile en doit découler naturellement, par l’intime union entre les deux puissances, et par la nécessité