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MÉMOIRES SECRETS

L’auteur avertit qu’il a puisé le fond de cet ouvrage dans une pièce anglaise, la même dont M. Sedaine a tiré le roi et le fermier. Ainsi voilà le mérite de l’invention nul. Celui de M. Collé est d’avoir adapté, dans son premier acte, différens traits et discours tirés des Mémoires de Sully. Dans les autres, il peint la naïveté, la sensibilité, les qualités aimables, et les faiblesses peut-être de ce grand roi. Quelques gens de mauvaise humeur jugent que c’est le dégrader ; d’autres qu’il est consolant de se retrouver dans son maître. Quoi qu’il en soit, la pièce n’a pu être jouée aux Français par ces raisons.

25. — M. l’abbé Coyer vient de faire paraître une brochure, moitié scientifique, moitié burlesque, intitulée de la Prédication[1]. Quoiqu’elle se vende publiquement et avec toutes les garanties de la police, nous ne doutons pas que cette brochure ne soit bientôt arrêtée. L’auteur prétend que, depuis Adam, aucun sermoneur ou moraliste n’a fait de conversion ; que toutes les belles sentences débitées, soit dans les chaires, soit aux théâtres, soit dans les écoles de philosophie, ne servent à rien pour l’épurement des mœurs ; que c’est au gouvernement, par une administration fondée sur de bons principes, sévères et soutenus, à former le cœur des citoyens, ou du moins leur conduite. En un mot, punir le vice et récompenser la vertu, voilà les deux mobiles sur lesquels doit rouler toute législation. L’auteur trace, d après ces principes, un plan de police intérieure, aussi qu’impossible à exécuter. Le livre est écrit avec une sorte de chaleur et de rapidité, En général, cet auteur ne peint ni largement, ni à grands traits : sa ma-

  1. Amsterdam (Paris), 1766, in-12. — R.