Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 2 - 1766-1769 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/133

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
129
mars 1767

auditeurs par un remède préparatoire, soporifique et anodin, et un sermon de méditation. Mon fils et moi nous souffrons, nous vous aimons, et nous vous honorons. »

25. — M.  Rousseau continue à garder un silence profond. De temps en temps quelqu’un élève la voix en sa faveur. On voit dans le numéro 35 du sieur Fréron un article intitulé : Sentimens d’un Anglais impartial sur la querelle de MM. Hume et Rousseau, extraits des papiers anglais du mois de novembre 1766 ; signé, un Anglais du vieux temps hospitalier et orthodoxe. Que ce jugement soit vrai ou controuvé par le journaliste, il est bien fait, et écrit avec une candeur qui plaira. Il est en faveur de M.  Rousseau, sans déguiser les torts qu’il peut avoir. M.  Walpole, l’auteur de la plaisanterie du roi de Prusse, y est surtout très-maltraité.

M.  Rousseau doit, au reste, goûter quelque consolation par le plaisir de voir son Devin de village traduit en anglais. En outre, un auteur, nommé M.  Burney, vient d’adapter des paroles en sa langue à la musique française. On a donné l’hiver cette pièce au théâtre de Drurylane, avec un succès partagé ; elle est soutenue par le parti anglais contre le parti écossais, qui avait entrepris de la faire tomber, et qui a interrompu les premières représentations par le bruit le plus affreux.

26. — Les Comédiens Français ont donné aujourd’hui la première représentation des Scythes. Cette pièce ne répond pas à ce que l’on pouvait attendre du pinceau sublime qui nous offrit jadis, avec tant de succès, les tableaux contrastés des mahométans et des chrétiens, des Américains et des Espagnols, des Chinois et des Tarares. M.  de Voltaire a voulu mettre ici en opposition l’âpreté des mœurs sévères des Scythes avec le faste or-