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mars 1767

phin à madame la Dauphine, et dont cette princesse a fait gardien M.  l’évêque de Verdun, son premier aumônier. On prétend que dans cette cassette sont différens mémoires, ouvrages et instructions du prince défunt, à remettre au duc de Berry, le Dauphin actuel, lorsqu’il sera en état d’en profiter.

19. — Un plaisant a répondu à M.  Tronchin, au nom de M.  Pictet ; on attribue même cette facétie à un grand poète[1], si bien accoutumé à tourner tout en ridicule.

« Monsieur, nous étions occupés, mon fils et moi, à relire les discours que je fis à Saint-Pierre aux dernières élections, et nous méditions sur le peu d’effet qu’ils ont produit, lorsque votre lettre nous est parvenue. Comme le travail ne nous enivre guère, mon fils ni moi, mon cher Monsieur, nous avons tout le loisir possible pour songer aux maux de l’État. Les bruits qui courent sur la suspension des rentes nous les font sentir vivement, et le ton pitoyable de votre lettre ajoute encore à notre affliction.

« Nous avons surtout été touchés de ces phrases où vous dites que vous avez l’âme brisée jour et nuit, que l’orgueil va devant l’écrasement, que vous gémissez en silence ; et mon fils proteste n’avoir jamais rien lu de si beau dans les sermons de son grand-père.

« Nous avons aussi admiré la noble hardiesse avec laquelle vous traitez vos concitoyens d’insensés, de malheureux, et leur démarche de persiflage. Mon fils approuve beaucoup la méthode d’insulter les gens ; mais il avoue que, depuis qu’il s’en est mal trouvé deux ou trois

  1. Cette lettre n’est point de Voltaire comme paraît le supposer l’auteur des Mémoires. — R.