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MÉMOIRES SECRETS

L’animal un peu libertin
Tombe malade un beau matin,
Voilà tout Paris dans la peine ;
On crut voir la mort de Turenne.
Ce n’était pourtant que Molet,
Ou le singe de Nicolet.

La digne et sublime Clairon
De la fille d’Agamemnon
À changé l’urne en tirelire,
Et, dans la pitié qu’elle inspire,
Va partout quêtant pour Molet,
À la cour et chez Nicolet.

Généraux, ratios, magistrats,
Grands écrivains, pieux prélats[1],
Femmes de cour bien affligées,
Vont tous lui porter des dragées :
Ce ne peut être que Molet
Ou le singe de Nicolet.

Si la mort étendait son deuil
Ou sur Voltaire, ou sur Choiseul,
Paris serait moins en alarmes
Et répandrait bien moins de larmes,
Que n’en ferait verser Molet,
Ou le singe de Nicolet.

Peuple, ami des colifichets,
Qui portes toujours des hochets,
Rends grâces à la Providence
Qui, pour amuser ton enfance,
Te conserve aujourd’hui Molet
Et le singe de Nicolet.

  1. V. 13 janvier 1767. — R.