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JANVIER 1766

nièce de mademoiselle La Mothe, ancienne actrice de la Comédie Française, a débuté hier à ce spectacle dans le rôle de Phèdre. On sent bien qu’un pareil rôle, le chef-d’œuvre du poète et du comédien, a été très-pitoyablement rendu. On voit dans cette jeune personne beaucoup de singeries de mademoiselle Clairon. Le vrai talent ne singe personne.

18. — Nos nymphes d’Opéra reproduisent les beaux jours de la galanterie antique. Mademoiselle Allard, célèbre danseuse, et remarquable par sa gaieté et ses folies chorégraphiques, pénétrée de douleur de la mort de son amant, M.  Bontemps, a déclaré que de six semaines elle ne pourrait contribuer aux plaisirs du public. Mademoiselle Basse, danseuse de chœurs, peu connue par ses talens, mais très-digne de l’être par sa constance héroïque, ayant elle-même engagé son amant, M. Prévôt, à contracter un mariage que sa famille désirait, a refusé toutes les pensions qu’on voulait lui faire. Elle a demandé qu’on eut soin de ses enfans, et s’est retirée dans un couvent, ou elle doit prendre le voile, après une vocation bien décidée.

22. — L’Académie Française a arrêté de faire célébrer un service pour le repos de l’âme de M.  le Dauphin. Elle a demandé en même temps la permission au roi d’en faire l’oraison funèbre par un de ses membres, et l’abbé de Boismout a été nommé pour cette cérémonie.

23. — L’on apprend la mort du célèbre Servandoni, arrivée le 20 de ce mois. C’était un homme d’un talent supérieur en architecture, mais d’une inconduite inconcevable. Nous avons négligé d’annoncer celle d’Armand, comédien célèbre, mort il y a deux mois[1]. Il y avait des

  1. Le 26 novembre 1765. Il était né en 1699. — R.