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MÉMOIRES SECRETS

Il s’élève, il s’abaisse, il s’ouvre, il se resserre ;
C’est un merveilleux instrument.
J’en jouais bien dans ma jeunesse ;
Moins bien pourtant que ma maîtresse.
Ô vous, qui cherchez le bonheur,
Sachez tirer parti d’un cœur.
Un cœur est bon à tout ; partout on s’en amuse ;
Mais à ce joli petit jeu,
Au bout de quelque temps il s’use ;
Et chacune et chacun finissent, en tout lieu,
Par en avoir trop ou trop peu.
Ainsi, comme un franc hérétique,
Je médisais du Dieu de la terre et du ciel :
En amour j’étais tout physique ;
C’est bien un point essentiel,
Mais ce n’est pas le point unique.
Il est mille façons d’aimer ;
Et ce qui prouve mon système,
C’est que la bergère que j’aime
En a mille de me charmer.
Si de ces mille ma bergère,
Par un mouvement généreux,
M’en cédait une pour lui plaire,
Nous y gagnerions tous les deux.

16. — Mademoiselle Mandeville a débuté hier aux Italiens, et a eu beaucoup de succès. Sa voix est d’un volume très-étendu, et d’un timbre harmonieux et flexible. Elle joint à une taille élégante une figure très-avantageuse. Elle a beaucoup d’expression dans son regard, d’âme dans son jeu, et joint à ces talens une grande intelligence. C’est une acquisition précieuse.

17. — Mademoiselle La Chassaigne, dite Sainval[1],

  1. Il ne faut pas confondre cette actrice avec une autre demoiselle Sainval, dont le début au même théâtre sera annoncé au 5 mai 1766. — R.