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MÉMOIRES SECRETS

fanatisme. Épitre à M. D. M.[1]. Ce poëme, de feu M. Guymond de La Touche, contient quinze à seize cents vers. Il est écrit avec force et souvent avec dureté. Ce n’est autre chose que le tableau de la Chartreuse, traité d’une autre manière. C’est presque la même marche ; mais il n’est personne qui ne préfère la mollesse, l’aisance, le délicieux du pinceau de M. Gresset, à la touche noire et sinistre de son imitateur.

16. — On vient d’imprimer Adélaïde du Guesclin, tragédie représentée, pour la première fois, le 18 janvier 1734, et remise au théâtre le 9 septembre 1765, donnée au public par M. Le Kain, comédien ordinaire du roi.

Cette pièce ne contient que très-peu de changemens, différant du Duc de Foix. Elle est remarquable par l’éditeur, et par la manière plaisante dont M. de Voltaire persifle le public à son ordinaire. Il veut nous faire croire que tout cela s’est passé sans sa participation et sans son aveu. Il faut lire la préface qui est très-comique.

18. — Les Comédiens Français ont donné aujourd’hui l’Avare, et Bonneval, qui faisait ce rôle, y a montré une présence d’esprit dont il faut conserver l’anecdote. Acte trois, scène onzième, après le troisième couplet où Cléante insinue d’une manière équivoque son regret que Marianne devienne sa belle-mère, au lieu de sa femme, Harpagon ayant témoigné sa surprise du compliment, Marianne répond à son tour. Mademoiselle Doligny qui faisait ce rôle, étant restée court, et le souffleur n’y étant point, le sieur Bonneval a repris sur-le-champ, au moment où les trois acteurs paraissaient stupéfaits, et surtout Marianne : « Elle ne répond rien, elle a raison ; à sot compliment point de réponse. » Tout

  1. Genève, 1765, in-8o. — R.