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AVRIL 1765

œuvre tous ses charmes auprès de M. le duc de Fronsac, et se flatte de réintégrer son père.

8. — Il paraît à Leipsick une huitième édition, en quatre parties in-8o, des Satyres de M. Rabener. Les deux premières parties ont déjà été traduites de l’allemand par MM. Sellius et de Boispréaux[1]. La vérité, la force et la grâce avec lesquelles ce grand homme décrit les mœurs de son pays, font désirer de voir la suite à la portée de notre nation.

9. — M. Quélant répand dans le public là traduction d’un sonnet de Pétrarque, qui commence par ces mots : S’amor non è, che dunque è quel ch’iosento ? Il peint à merveille le caractère original de cet auteur.


Si ce n’est point amour, qu’est-ce donc que je sens ?
Si c’est amour, grand Dieu, quelle espèce est la sienne ?
Pourquoi, si c’est un bien, cause-t-il mes tourmens ?
D’où vient, si c’est un mal, aimé-je tant ma peine ?
Si j’aime de bon gré, d’où vient que je gémis ?
Si j’aime malgré moi, que me servent mes larmes ?
Ô mort vive et sensible, ô tourment plein de charmes,
Comment à ton pouvoir me suis-je donc soumis ?

Si je l’ai bien voulu, j’ai donc tort de me plaindre.
Agité par les vents de cent côtés divers,
Je suis comme un vaisseau qui se perd sous les mers.

Hors de moi, je ne sais qu’espérer ni que craindre,
J’ignore qui je suis, quelle est ma volonté,
Je brûle en plein hiver, et tremble en plein été.

10. — M. le comte de Lauraguais et mademoiselle Arnould sont deux personnages trop intéressans dans le monde littéraire pour ne pas rassembler avec empresse-

  1. Sellius a été assez fréquemment le collaborateur de Bénigne Dujardin, maître des requêtes, caché ici sous le masque de Boispréaux. — R.