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FÉVRIER 1765

très-désagréable ; j’ai beau faire de mon mieux, on me critique, on me condamne, on me hue, on me bafoue, et cependant je ne donne point ma démission. Immolons, vous et moi, nos ressentimens à la patrie, et servons-la de notre mieux, chacun dans notre genre. D’ailleurs, la reine ayant fait grâce, vous pouvez, sans compromettre votre dignité, imiter la clémence de Sa Majesté. » La reine de théâtre a souri avec noblesse à ce propos, et s’est retirée fort mécontente du persiflage. Elle est revenue chez elle, où s’est tenu un comité avec ses amis et la troupe des Comédiens, présidés par M. le duc de Duras ; et l’on est convenu que celui-ci ferait craindre à M. de Saint-Florentin la désertion de toute la troupe, si l’on ne faisait pas raison à la Melpomène moderne de l’insolence de Fréron. Cette démarche a fort étourdi M. de Saint-Florentin, et ce ministre écrit à une princesse que l’affaire devient d’une si grande importance, que depuis long-temps matière aussi grave n’a été agitée à la cour, qu’elle en est divisée ; et que, malgré son propre respect pour les ordres de la reine, il ne sait s’il ne sera pas obligé de prendre là-dessus ceux du roi. En sorte que Fréron est encore dans les transes.

22. — Le Siège de Calais a été joué hier à la cour, Le roi en a paru très-flatté ; il a accepté la dédicace que M. de Belloy a demandé d’en faire à Sa Majesté, et la pièce doit être imprimée au Louvre, honneur que n’a jamais eu Corneille. En outre, le roi a chargé M. de L’Averdy d’aviser au moyen de récompenser cet auteur.

24. — Lettre de M. l’abbé de Rancé à un ami, écrite de son abbaye de la Trappe, par M. Barthe. Cet ouvrage annoncé depuis long-temps, parait aujourd’hui, in-8o, enrichi d’estampes et de vignettes ; luxe moderne, dans